En 1997, André Schall était membre de l’équipe de bénévoles qui entouraient Charles-Laurent Salch aux châteaux d’Ottrott. Le 10 juin 1997, André accompagnait une classe verte de Cronenbourg, lorsque, après la passerelle de bois du Rathsamhausen, entre les deux portes, il trouve un carreau d’arbalète.
Aujourd’hui André monte souvent voir les Amchott aux châteaux et nous parle des chantiers d’alors. Il nous a confié son carreau d’arbalète. Le voici !
Arbalète
L’arbalète était déjà connue du temps des romains. Au cours des siècles, elle a connu une longue évolution. Les systèmes de chargement, de tension du boyau se sont améliorés, jusqu’à en faire une arme terriblement efficace. Du temps des chevaliers, elle était mal considérée : arme des lâches, elle tue au loin, sans besoin de courage ou de force physique. Cependant, les carreaux d’arbalète transpercent une armure à plus de cent mètres : l’arme s’imposera.
Lors du Concile de Latran (1139), l’Eglise interdit l’usage de l’arbalète lors de combats entre chrétiens ! Mais, l’arme reste licite contre les infidèles. Bigre !
Voici les deux schémas proposés par C.L. Salch dans son ouvrage, La Clef des châteaux forts d’Alsace.
La forme des carreaux d’arbalète évolue au fil du temps. Le carreau retrouvé au Rathsamhausen date du début du XVIème siècle. Il mesure 6 cm de long et pèse 20 grammes.
Les archères du château de Lutzelbourg
Le château de Lutzelbourg à Ottrott possède de nombreuses archères. De formes bien différentes, elles sont les témoins de l’évolution des armements.
- En bas des chemises du haut château : archères pour le tir à l’arc, avec fente verticale et niche de petite dimension.
- Dans les murs boucliers : archères pour arbalète, avec fente verticale et vaste niche
- Dans les braies et barbacanes : fentes de tir pour couleuvrines et bâtons à feu, en forme de clefs. Nous sommes au début du XVème siècle, les armes à feu ont changé l’art de la guerre.
- Et voici, la même archère, vue de l’intérieur du château.
- En fait, la fente étroite s’ouvre sur une vaste niche avec un arc surbaissé. La manœuvre de l’arbalète suppose de la place, du volume, pour renverser et recharger l’engin. On note que la niche comporte une sorte de petite armoire murale. Peut-être y logeait-on la réserve des carreaux ?
- Le mur bouclier est totalement aveugle, pas une ouverture si ce n’est une haute fente verticale, tournée vers le château voisin de Rathsamhausen.
- Voyons les deux grandes archères des murs boucliers. Voici ce que voyait l’assaillant, coté extérieur du château.
L’accès aux archères et au donjon du Lutzelbourg
Voici une photographie du l’intérieur du château de Lutzelbourg. On distingue, le donjon avec sa porte ogivale, les deux murs boucliers, les deux vastes niches d’archères pour arbalètes. Celle de gauche est complète, la façade de l’archère de droite s’est effondrée dans les fossés. L’ensemble reste saisissant.
Nous avons demandé à notre ami Raoul d’imaginer et de remettre en place les accès des archères et du donjon. Voici l’aquarelle de Raoul.
Notre artiste s’est basé sur les corbeaux et traces d’arrachement sur les murs pour imaginer les structures en bois. La galerie et l’escalier vers le donjon étaient-ils vraiment couverts ? Difficile à déterminer. L’accès à cette galerie se faisait-il du logis nord ou du sol ? Nous ne saurions le dire. Raoul a préféré ne pas traiter le sujet.
Merci à lui de nous faire rêver du Lutzelbourg au temps des chevaliers.
Sources
C.L. Salch, La Clef des châteaux forts d’Alsace, 1995
J.F. Fino, Armes et armées du Moyen Age, 1964
Illustrations
Photographies, PiP
Aquarelle de Raoul Geib
Dessins d’arbalète et des carreaux, extraits du livre de C.L. Salch
Arbalète, dessins tirés de Bellifortis, Konrad Kyeser, ~1380